Selon les stoïciens, nous voulons deux types de choses. Les choses qui sont sous notre contrôle et les choses qui ne sont pas sous notre contrôle. Les choses sous notre contrôle sont celles qui ne dépendent que de nous, c'est-à-dire celles qui existent à cause d'une cause en nous (notre volonté) et uniquement à cause de cela. Ce sont les actions de notre esprit : nos opinions, nos poursuites, nos désirs, nos aversions, etc.

Par exemple, j'ai telle opinion parce que je veux penser à cette pensée et uniquement pour cette raison. Les choses qui ne sont pas sous notre contrôle, par contre, sont celles qui ne dépendent pas de nous, c'est-à-dire celles qui n'existent pas à cause de notre volonté ou pas seulement à cause de notre volonté. Elles englobent notre corps, notre richesse, notre renommée, notre pouvoir, et toutes les choses extérieures.

Le bonheur

Épictète, le célèbre stoïcien, utilise cette distinction essentielle pour expliquer le malheur et le bonheur. Le malheur, affirme-t-il, résulte du fait de considérer comme dépendant de nous des choses qui n'en dépendent pas.

A l'inverse, le bonheur résulte du fait de considérer les choses qui sont sous notre contrôle en tant que telles. Épictète essaie aussi de définir les moyens du bonheur. Pour être heureux, un homme doit d'abord considérer les choses qui sont sous son contrôle en tant que telles et les choses qui ne sont pas sous son contrôle en tant que telles. Il doit également ne vouloir que les choses qui sont sous son contrôle. Car le bonheur est l'état de celui qui a toutes les choses qu'il désire. Si vous ne voulez que les choses qui dépendent de vous, vous aurez tout ce que vous voulez et vous serez heureux.

L'aversion

Le même conseil s'applique à l'opposé du désir, c'est-à-dire à l'aversion. Pour être heureux, un homme doit s'abstenir d'avoir de l'aversion pour les choses qui ne dépendent pas de lui et transférer son aversion vers les choses qui dépendent de lui mais qui ne sont pas souhaitables, les « choses contraires à la nature », comme le dit Épictète (Enchiridion, 2 ).

Car tous les hommes souffrent de désirer des objets qui ne dépendent pas d'eux et qu'ils n'obtiennent pas, mais aussi d'avoir de la répugnance pour des objets qui ne dépendent pas d'eux et qu'ils doivent supporter : «Celui qui n'obtient pas l'objet de son désir est déçu, et celui qui encourt l'objet de son aversion malheureux » (Enchiridion, 2). Si donc les hommes avaient seulement de l'aversion, parmi les choses qui dépendent d'eux, pour les choses contraires à la nature, ils ne seraient jamais malheureux. Si nous considérons les choses de manière adéquate et ne voulons ou ne détestons que les choses qui sont sous notre contrôle, non seulement nous serons heureux, mais, ajoute Epictète, nous serons blindés contre les flèches de la vie, car les choses désagréables et nuisibles ne nous feront aucun mal : Epictète recommande, "que ce ne soit rien pour vous" (Enchiridion, 1).

Car nous souffrons lorsque nous voulons une chose qui ne dépend pas de nous et que nous ne parvenons pas à obtenir.

Des aspirations et répugnances légères

Mais que faire des désirs et répugnances existants en attendant d’avoir atteint la sagesse ? «Pour le présent, supprime totalement tout désir”, conseille Epictète, ou, du moins, contente-toi de n’avoir que des aspirations et répugnances légères. Car, celui qui désire sans avoir la sagesse, soit il désire des choses qui ne dépendent pas de lui et ses désirs sont insatisfaits, soit il désire des choses qui dépendent de lui et qu'il n’est pas beau de désirer, soit il désire des choses qui dépendent de lui et qu'il est beau de désirer mais il ne les possède pas faute d’avoir la sagesse.

Prendre les choses avec stoïcisme

Finissons par une histoire. Épictète était un esclave et il était censé boiter à cause du malheur suivant. Un jour, son propriétaire, Epaphroditos, a voulu tordre la jambe d'Epictète dans une botte en acier pour le blesser. Epictète le prévint avec calme : « Tu vas me casser la jambe ». Mais Epaphroditos n'écouta pas cette mise en garde et continua à tordre la jambe d’Epictète pour finir par la briser. Le philosophe lui aurait alors tout simplement déclaré : « Je te l'avais bien dit : maintenant elle est cassée »...