Y a-t-il un but des études ? Les études s’appliquant à une multitude d’objets (ceux des sciences constituées), elles semblent orientés vers une multitude de buts différents. Alors, par-delà la diversité des objets des différentes sciences étudiées, l’étude de ces différents objets sert-elle un but unique ? Ce qu'il y a de commun aux études des différentes sciences, c’est l’application (studium) avec laquelle celui qui étudie fait l’étude d’une science. Toutefois, on peut dire que le but de toute étude, c’est la connaissance de l’objet de la science étudiée.

Mais il faut distinguer entre le but et la fin. Le but est une fin qui peut être atteinte et, une fois atteinte, il n’y a plus rien à chercher. En revanche, une fin qui n’est pas un but est une fin vers laquelle on peut tendre sans jamais l’atteindre : c'est un idéal irréalisable mais à réaliser comme le bonheur, la satisfaction parfaite de tous ses désirs. Il semblerait, dans ces conditions, que notre question se divise en deux : y a-t-il une fin des sciences et donc des études ? Et cette fin est-elle un but qu'on peut atteindre et au-delà de quoi il n’y a rien à chercher, ou une fin indéfiniment recherchée ?

La contemplation de la vérité

Descartesartes, dans les Regulae ad directionem ingenii, distingue d’abord plusieurs fins particulières (au sens de non cmmunes à toutes ls études) possibles des études (cf.

le titre de la règle 1). En ce qui concerne les fins louables, elles st deux : 1/ la commodité de la vie et la contemplation de la vérité. Il y aurait donc deux fins particulières des études. Ou plutôt, deux buts. Car la commodité de la vie est un but et la contemplation de la vérité est aussi un but. Mais ne pourrait-on objecter à Descartes que la seule fin des études qui soit vraiment leur fin, c’est la fin de l’esprit qui recherche la connaissance d’un objet.

Or, la commodité de la vie est fin du corps vivant et non de l’esprit. La fin des études semble donc être la contemplation de la vérité. Mais si on admet q la contemplation de la vérité est le but des études, il n’est pas certain que nous ayons alors identifié un but et un seul : car il semble qu'il y ait autant de contemplations et donc de buts différents que d’objets contemplés.

En effet, chez Aristote, il y a plusieurs types d’objets à contempler, auxquels correspondent trois sciences (théorétiques) distinctes : théologie, physique, mathématiques. Il y a donc trois sortes d’études, poursuivant des buts différents.

Les mathématiques

On peut se demander pourquoi le mê mot grec désigne à la fois les mathématiques et les études en général. Cela ne peut s’expliquer que dans une perspective platonicienne (cf. République, VI, VII). Pour Platon, les mathématiques sont des études préparatoires : elles sont l’activité de celui qui s’applique à la science mais n’a pas encore atteint le but, le degré où devient possible la contemplation de l’être intelligible. Si nous revenons à la question q nous nous sommes posée : « y a il un seul but des études ?

», nous comprenons maintenant pourquoi Descartes refuse d’admettre la contemplation comme le but des sciences et donc des études. Si la fin des études est bien la possession du vrai (comme dans la contemplation vraie d’un objet), celle ci n’est possible que lorsque nous déployons d’une certaine manière notre puissance de connaître, laquelle n’a procédé de cette bonne manière que dans un seul domaine jusqu'à l'époque de Descartes : « l’Arithmétique et la Géométrie étaient les seules exemptes de tout défaut de fausseté ou d’incertitude, (…) l’Arithmétique et la Géométrie st beaucoup plus certaines que les autres disciplines : c’est qu'elles sont les seules à porter sur un objet si pur et si simple qu'elles n’ont à faire absolument aucune supposition que l’expérience puisse rendre douteuse et qu'elles sont toutes entières composées de conséquences à déduire rationnellement » (cf.

Règle 2).

La méthode

Il apparaît que les études auraient bien un fin et une seule, donner à l’esprit la méthode par laquelle il peut parvenir à une vérité certaine. Le but des études ne serait donc pas la science de tel ou tel objet, la contemplation de tel ou tel être, mais plutôt de rendre l’esprit capable d’atteindre la vérité dans toute recherche. Mais ce but (fin pouvant être atteinte) est le moyen d’une fin qui n’est pas un but, car sa réalisation est interdite à l’homme : la possession de la vérité absolue.