Le 26 juillet 2019, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), dans le « global tobacco epidemic report » aux conclusions prémonitoires adressait une mise garde sur l’utilisation des cigarettes électroniques et du tabac chauffé en rappelant qu’il s’agit de produits nocifs. A partir du 15 août, les agences sanitaires américaines ont commencé à communiquer sur des cas de maladies pulmonaires concernant des consommateurs de cigarettes électroniques. Aujourd’hui 2 octobre 2019, le bilan est très lourd : 13 morts et plus de 800 hospitalisations.
Aussitôt fabricants de cigarettes électroniques et fabricants de tabac, qui ont lancé les produits du tabac chauffé (Iqos, Ploom, Glo par exemple) et qui investissent de façon croissante dans le secteur des cigarettes électroniques ont tenté de relativiser ce drame sanitaire, en affirmant qu’il ne concernait que les Etats-Unis, et que les utilisateurs avaient consommé des produits dérivés du cannabis.
En France, ces propos ont été notamment repris par le professeur Bertrand Dautzenberg, pneumologue, affirmant que critiquer la cigarette électronique revenait à encourager la consommation de tabac traditionnel ! De son côté, Agnès Buzyn, Ministre des Solidarités et de la santé a balayé tout risque pour les consommateurs français au nom certainement de la traditionnelle « spécificité française », déjà revendiquée lors du nuage de Tchernobyl.
Un malade sur quatre a fumé de « simples » cigarettes électroniques
Le problème est que ces deux arguments sont faux : d’une part le Canada, la Suisse et maintenant le Royaume-Uni, où la première victime de la cigarette électronique daterait même de 2010, sont également concernés, et d’autre part, selon les chiffres des agences sanitaires américaines, 77% des consommateurs concernés ont déclaré avoir utilisé des produits contenant du THC (tétrahydrocannabinol, l'agent psychoactif du cannabis).
Autrement dit, près d’un utilisateur sur quatre a consommé des cigarettes électroniques dans des conditions normales d’utilisation, et est tombé malade, voire est mort.
Quelles conséquences en tirer ?
Face à cette situation et à ces chiffres, il faut éviter deux écueils : celui de l’angélisme dont sont atteints Agnès Buzyn, ou les professeurs Bertrand Dautzenberg et Gérard Dubois, de l’académie nationale de médecine, ainsi que celui du catastrophisme.
Deux circonstances apparaissent clairement :
- le tabac chauffé (Iqos, Ploom, Glo…), que les quatre fabricants de tabac Philip Morris International, British American Tobacco, Seita-Imperial Brands et Japan Tobacco International, souhaitent promouvoir comme une alternative au tabac traditionnel, et pour lequel ils conduisent des opérations de lobbying pour obtenir une législation et une fiscalité spécifiques, n’est pas assimilable aux cigarettes électroniques.
Le tabac chauffé reste du tabac. On doit donc lui appliquer la législation et la fiscalité applicables au tabac traditionnel. Il s’agit d’ailleurs d’une exigence de l’OMS, telle que clairement mentionnée dans son rapport cité en introduction. Pourtant, à voir les publicités dans les tabacs et les emballages de ces produits, on ne s’étonne plus que les adolescents fondent sur ces produits au packaging attrayant.
- Depuis les cas révélés aux Etats-Unis, on doit pouvoir l’affirmer, à l’instar de l’OMS : la cigarette électronique est nocive. La question de savoir si elle est aussi nocive ou moins nocive que la cigarette traditionnelle est prématurée.
Elle sera tranchée avec le temps, grâce aux études scientifiques indépendantes qui seront conduites mais qui vont prendre du temps.
Ce qui est certain depuis la publication de la très sérieuse étude de l’Université de Médecine de Baylor.
Dans l’attente, et comme dans les nombreuses matières par nature plus dangereuses où sa mise en oeuvre est évidente, il conviendrait d'appliquer le principe de précaution.