La France attend des décisions fortes après la fin ou l’atténuation de la pandémie du COVID 19. Le Président Macron a été élu en 2017 sur un programme réformiste et sur un mix politique qui faisait la synthèse entre la droite et la gauche sans dissoudre ni l’une, ni l’autre. Cette formule intellectuelle s’est matérialisée dans le champ politique par le « en même temps ». Macron a précipité la reconfiguration du champ politique en affaiblissant les partis traditionnels de droite et de gauche. La France a salué le stratège Macron alors que les partis de droite et de gauche se sont repliés sur eux-mêmes en attendant des jours meilleurs.

Macron, à marche forcée, a entrepris de réformer la France dans les domaines de l’assurance chômage (marché du travail). D’autres réformes, comme celle des retraites, sont pour l’instant suspendues et on ne sait pas si elles seront abandonnées. Sur le plan de l’Education nationale, la réforme du bac, malgré quelques difficultés en 2019, est en route en 2020 à la faveur du COVID 19. Macron avait promis une réforme de l’État et de la Constitution (diminution du nombre de députés et introduction de la proportionnelle). Des réformes fiscales ont été faites en passant de l’ISF à l’IFI. Le président a envoyé à la population des signes significatifs de sa volonté réformiste en indiquant aux Français que la théorie du ruissellement (les premiers de cordée doivent être considérés pour entraîner le reste de l’économie) est valide.

Ces recettes pragmatiques peuvent-elles être considérées comme du macronisme ou comme du pragmatisme pour changer les comportements des acteurs politiques, économiques et sociaux de la société française ?

Le président Macron prend acte de l’idéologisation de la société française

Cette période, qui a duré quasiment deux ans, a été considérée comme une verticalisation du pouvoir.

Les syndicats, les collectivités territoriales, n’ont jamais été consultés. La crise des Gilets jaunes a ébranlé le macronisme triomphant en questionnant la posture du président de la République. Le Président a organisé un Grand débat en disant aux Français qu’il avait compris et qu’il allait changer de posture. Les maires, hier ignorés par le président Macron, sont progressivement revenus dans le jeu politique au nom d’une démocratie de proximité.

Macron n’a pas apporté les réponses profondes aux questions des Gilets jaunes, ce qui s’est traduit par des manifestations continues tous les samedis dans la société française.

Macron sait, par sa culture historique immense, que la société française est d’abord une société idéologique et que les transformations à faire doivent être à l’aune de cette culture idéologique. Il est passé outre, au nom de la mondialisation et au nom du programme sur lequel il a été élu. D’ailleurs, tous les défenseurs du Président, ont mis l’accent sur les réformes pour lesquelles il a été élu et la nécessité d’aller jusqu’au bout de celles-ci. Le problème est que la pandémie du COVID 19 oblige le président Macron à changer de stratégie.

Lui-même le reconnaît et décide de se réinventer et de réinventer la politique. C’est une adresse à l’opposition, encore faut-il que cette opposition politique soit patriote et accepte de travailler avec Macron à deux ans de l’élection présidentielle de 2022.

Emmanuel Macron doit inventer une idéologie de l’union nationale pour espérer gagner en 2022

Macron a reconnu ses fautes face aux infirmiers en disant que la stratégie concernant la santé n’était pas la bonne. Il a fait un virage idéologique important en passant de l’argent « non miracle » à l’argent abondant concernant les hôpitaux. Il a suspendu la réforme des retraites ; il veut mettre l’accent sur les solidarités nouvelles, sur la protection sociale, sur la transition écologique et, sans le dire, il souhaite un contexte politique nouveau, à l’image de celui qui a existé au sortir de la guerre de 39/45, initié par le Général De Gaulle, pour permettre aux différentes forces politiques françaises de réfléchir sur une nouvelle France marquée par des jours heureux.

La tâche est immense, la piste est sinueuse, les adversaires sont nombreux. Il reste à Macron de sortir de la posture de communication qui est la sienne pour revenir, hélas même si cela est contre sa nature, par dessiner un contour idéologique qui permette aux Français de recommencer à lui faire confiance. Le « en même temps » a vécu, il reste au président Macron de dessiner intellectuellement une idéologie de l’union. Il lui faudra, au moment où on célèbre le Général De Gaulle, de donner des contours précis sur la nouvelle idéologie de l’espérance qu’il veut pour la France. C’est à ce prix que les Français lui referont confiance pour un deuxième mandat en 2022.