Tout d'abord, qui seront les candidates et candidats frontistes ? On présume simplement qu'ils seront mieux formés, donc meilleurs perroquets et perruches dociles. D'où viendront-elles et ils ? D'un peu partout, mais il leur faudra conserver le cinquième de l'électorat de François Fillon qui a voté Marine Le Pen (et moins les 7% de l'électorat de Jean-Luc Mélenchon plus soucieux d'affaiblir Emmanuel Macron que de voir la cheffe de file du souverainisme prétendu antilibéral devenir locataire de l'Élysée). Alors, que leurs penchants les portent vers une sorte de "gauche" ou non, il s'agira de droitiers affirmés ou de perdants.

Le duo Marine Le Pen-Florian Philippot, qui a fait volte-face en s'appuyant sur les MacronLeaks pour redroitiser le positionnement général, aura du mal à revenir en arrière. La base s'est certes élargie, mais avec des déperditions d'élus, qui s'exprimeront sans doute sur les raisons pour lesquelles ils ont démissionné ou changé d'étiquette. L'apport de Debout la France est négligeable : à peine plus d'un tiers de son électorat est resté derrière Nicolas Dupont-Aignan. La direction du FN revient peu à peu aux fondamentaux : homophobie, islamophobie, et entretient d'une peur d'un conflit avec la Russie. Ce que Vladimir Poutine a bien compris. Dirigeant avisé, s'appuyant lui aussi en partie sur une extrême-droite qu'il ne peut pas plus décevoir qu'un Jean-Luc Mélenchon ne peut désespérer une ultragauche plus viscérale que raisonnée, son objectif est d'affaiblir le plus possible la construction européenne.

Cela n'en fait pas un tyran absolu, ni un va-t'en guerre à tout crin. Le groupe Front National (s'il s'en forme un, ce qui n'est pas assuré) va servir à quoi ? À faire de l'obstruction sur des sujets sociétaux (homosexualité, planning familial), à donner des gages de bonne coopération à la Russie ? À réclamer des sapins de Noël dans les édifices publics et des crèches dans les écoles publiques ?

À faire prendre des boules puantes fabriquées pour des éléments de doute devant profiter à l'accusation ? À réclamer l'interdiction aux mineurs des livres et films ridiculisant les cultes ? À tenter d'obtenir qu'un hommage national d'ampleur soit rendu aux harkis ? À soutenir qu'Emmanuel Macon est homosexuel ? Tout cela pour cela ?

Parasites ou constructifs ?

Il ne faut pas pourtant désespérer des futurs élus du FN. Car la confrontation aux réalités est formatrice. Certaines et d'aucuns prendront peut-être leur mandat – si on leur en laisse le loisir – au sérieux. L'électorat saura peut-être les discerner. De même, Christian Estrosi a peut-être évolué. Pourquoi n'en serait-il pas de même pour des députés FN ? Et puis, des Cahuzac, des François Fillon, on en trouve partout et il s'en trouvera immanquablement chez La République en marche : les profiteurs de mandats, hormis à l'extrême-gauche (sauf lorsqu'elle peut accéder à des postes, ce qui s'est vérifié à l'étranger), se répartissent un peu partout. Il ne s'agit plus d'appeler à faire barrage à toute candidature FN, mais d'inciter à discerner entre gens de convictions, même opposées aux siennes propres, sincères et honnêtes.

Ce dans la perspective de divers duels, triangulaires et quadrangulaires. Le seul critère intangible reste la complaisance pour la désinformation et les fausses nouvelles. En clair : qui vous bourre le mou n'est pas digne de vous représenter. Avec le second volet des MacronLeaks ou autre chose. Pour le reste, choisir les moins stupides et les moins moutonniers. Peut-être les moins europhobes et les moins psychorigides. D'où qu'ils proviennent. Et puis, au FN aussi, les interrogations sur la politique de Donald Trump et les conséquences du Brexit sont présentes. De même qu'il n'a pas échappé que le Kremlin soutient le dictateur tchétchène musulman fondamentaliste de façade. Ne désespérons d'aucun de nos concitoyens jusqu'à la preuve de sa vénale pourriture.

Et puis, au fait, comment préjuger de la suite quand "le président Trump a fait part de son souhait de travailler étroitement avec le président élu Macron pour faire face à des défis communs et il a souligné la longue et solide tradition de coopération entre les Etats-Unis et son plus vieil allié, la France." ? Un peu de formation à la realpolitik ne ferait pas de mal : qu'on ne compte pas trop sur le FN pour ce faire... Ni pour être clair sur le Penelopegate et le Riwalgate.