On a connu visite officielle plus chaleureuse que celle entre Emmanuel Macron et Recep Tayyip Erdogan, vendredi à Paris. Les deux chefs d'Etats ont en effet abordé des sujets majeurs, dont celui des Droits de l'Homme. Une thématique sur laquelle le président de la République française a affirmé ses désaccords avec son homologue. Emmanuel Macron a d'ailleurs fait part de ses inquiétudes au leader turc, notamment sur le sort des enseignants, des étudiants ou encore des journalistes qui sont la cible du régime turc depuis le coup d'Etat manque survenu en 2016.

« Nos démocraties doivent complètement protéger l'état de droit », a ainsi déclaré Emmanuel Macron lors d'une conférence de presse conjointe en compagnie de Recep Tayyip Erdogan. De son côté, le président turc n'a pas hésité à lancer que plusieurs journalistes sont « responsables de nourrir les terroristes à travers leur écrits ». Erdogan a même accusé les journalistes d'être des « jardiniers » de la pensée terroriste, au cours d'une conférence de presse plutôt tendue. Plusieurs journalistes n'ont pas hésité à poser des questions bien affirmées au président turc, ce dernier ne se privant pas de répondre sur un ton acerbe, devant un Emmanuel Macron tendu lors de chaque réponse de son homologue.

Pas encore d'adhésion de la Turquie à l'UE

Une tension qui n'est pas retombée lorsqu'un journaliste a interrogé Recep Tayyip Erdogan sur le sujet de la Syrie, et un possible envoi d'armes de la Turquie dans ce pays dans le passé. Le président turc n'a alors pas hésité à tancer le journaliste. « Ne parlez pas avec les mots d'un autre », lui a-t-il lancé, faisant référence aux propos anti-Erdogan en Turquie.

Mais le sujet majeur de cette journée a été incontestablement la question de l'Union Européenne. En effet, ce voyage diplomatique était surtout destiné à améliorer, dans la mesure du possible, les relations entre la Turquie et l'UE. Il s'agissait d'ailleurs du premier voyage du président turc à Paris depuis la tentative de coup d'Etat survenue en Turquie en 2016.

Le pays, qui attend un geste de la part des dirigeants européens depuis de nombreuses années en vue d'une possible entrée dans l'UE, n'a sans doute pas reçu satisfaction vendredi. « Pour les relations avec l'Union européenne, il est clair que les récents développements ne permettent aucun progrès dans le processus », n'a pas hésité à affirmer Emmanuel Macron, faisant référence à la question des Droits de l'Homme. Son homologue lui a simplement rétorqué que la Turquie se laissait d'attendre la décision de l'Union européenne.

La Turquie, allié précieux de la France en Syrie

Faute d'adhésion, Emmanuel Macron a tout de même proposé un « partenariat » à la Turquie et à son président. Un geste envers un pays essentiel à la France, notamment dans les combats en Syrie.

Au-delà des « différences de vues », le président de la République française veut donc « maintenir le dialogue » avec la Turquie ». Un geste apprécié par Recep Tayyip Erdogan, qui a qualifié de « très bon départ » sa rencontre avec Emmanuel Macron. Avec cette offre de partenariat inédite, la France confirme qu'elle veut prendre le leadership en Europe en tendant la main à un pays majeur comme la Turquie. Emmanuel Macron se montre ainsi plus diplomatique que l'Allemagne, puisque les relations entre cette dernière et la Turquie ont quasiment atteint un point de non-retour l'an dernier. Le pouvoir allemand n'avait en effet pas hésité à critiquer ouvertement le régime dirigé par Erdogan, confiant qu'une adhésion de la Turquie à l'Union européenne était désormais devenue très hypothétique. Visiblement, Emmanuel Macron est plus ouvert qu'Angela Merkel sur le sujet.