Il ne faut pas se mentir : peu d’entre nous frémissent à la nouvelle de la disparition des espèces frugivores (ou d'autres espèces sauvages) à l’autre bout du monde. Nous adhérons peut-être à la cause animale, mais nous nous disons que le déclin des propithèques de Madagascar ou des perruches de l’île Maurice ne nous concerne pas directement. Sans vouloir être pessimiste, une récente enquête scientifique a établi une forte corrélation entre l’avenir de la forêt et l’avenir des espèces frugivores. Essayons de décrypter le phénomène.

Les mammifères frugivores comme l’éléphant, le gorille ou l’écureuil, jouent un rôle capital dans la reconstitution des forêts denses tropicales.

Leur prospérité, leur état de danger ou leur extinction servent par conséquent de baromètre pour mesurer la santé du milieu naturel. Telle est la conclusion de l’étude menée conjointement par le CNRS et le Muséum national d’histoire naturelle, qui vient de paraître dans la revue Functional Ecology. Pour parvenir à ce résultat, les scientifiques se sont penchés sur les relations entre les mammifères et les plantes en calculant la taille des graines ingurgitées par jour.

L'extinction des espèces néfaste pour notre écosystème

Le régime nutritif de certains mammifères contient une forte proportion de fruits. Chaque fois qu’ils défèquent, ces Animaux disséminent des graines dans le sol. Les graines germent et finalement portent de nouveaux fruits.

Ainsi, le peuplement forestier se reconstitue indéfiniment grâce à l’appétit de ces frugivores. Leur survie est primordiale dans les écosystèmes tropicaux, où la plupart des espèces ligneuses ont des grosses graines qui pèsent trop lourd pour que les agents atmosphériques puissent les disséminer.

Ainsi, l’extinction des espèces disséminatrices de graines est néfaste pour l’avenir de l’écosystème dans son ensemble, puisque la chaîne alimentaire est brisée.

Nos forêts ne pourraient prospérer à long terme si ces dernières venaient à mourir. En tuant les primates mangeurs de graines, l'homme empêche par la même occasion la repousse d’arbres tropicaux qui séquestrent le carbone, régulent le cycle de l’eau, assurent de bonnes précipitations et préviennent la sécheresse et la désertification.

L’étude met l’accent sur l’étroite relation qui lie tous les vivants quelle que soit leur place dans la chaîne alimentaire. L’étude lance un appel à l’action contre la chasse intensive qui guette les tapirs ainsi que les éléphants d’Asie, et contre la déforestation qui perturbe les habitats des lémuriens de Madagascar.