Ce dimanche 17 juin, organisée conjointement à l’initiative de la municipalité de « Ferrals les Montagnes » et de l'association « le souvenir Français », s’est déroulée une cérémonie commémorative au lieu-dit : « Le Col de Serrières ».
Le Col de Serrières, situé au cœur de la montagne noire à une altitude 678 mètres est un lieu fréquenté par de nombreux randonneurs et cyclistes. Pourtant parmi ces touristes d’un jour, combien se souviennent avoir remarqué sur le bord de la route, une stèle sur laquelle sont gravés les noms d’une poignée d’innocents assassinés.
Un traitre dénonça auprès des autorités allemandes le parachutage et l'adresse probable à laquelle il trouveraient des caches d’armes. Immédiatement l'information fit réagir ceux que les circonstances transformeront en criminels de guerre.
La soldatesque n’ayant rien trouvé, par frustration, s’est vengée en abattant leurs otages ensuite, après avoir attaché dans son habitation un fermier du voisinage, les bourreaux y ont bouté le feu.
Une page d'histoire
Cette sombre histoire est loin d'être anecdotique. L’Europe fut traversée par un vent de folie et c’est pour que l’on se souvienne de ceux qui payèrent de leur vie le silence ou, la volonté de résister que des femmes et des hommes parcourent chaque année de longues distances afin de fleurir ces lieux quelquefois isolés.
Le sommet du Col de Serrières en témoigne. Au croisement d’un chemin, sur le côté de la départementale, s’élève une pierre taillée dans le marbre rose. Quelques mots y sont gravés effleurant le calvaire vécu par les victimes de cette tragédie.
"En ces lieux, le 15 juin 1944, des soudards allemands, après avoir pillé et incendié le hameau du col de Serrières ont assassiné Marguerite Iché, 58 ans, Aimé Iché, 28 ans, François Valères, 43 ans, tous trois habitant au col de Serrières, Roger Gaubil, 23 ans, de Labastide-Rouairoux, André Houlès, 21 ans, de Mazamet, réfractaires au STO, membres des FFI.
Passant souviens-toi, ils sont morts pour que tu vives libre"
On aurait pu croire que les souvenirs s’effaceraient progressivement de la mémoire collective et pourtant, comme le soulignet Monsieur Houlès qui présidait l'assemblée, en 2018 le nombre de personnes présentes sur les lieux de la cérémonie témoigne du contraire.
Ce dernier ajoutait qu’ils (les membres du souvenir Français) espéraient tenir jusqu’en 2000 et que c'est avec émotion qu'il peut affirmer qu'après avoir dépassé cette échéance d’un peu moins de vingt ans, le souvenir reste ancré dans les mémoires.
Parmi la foule réunie autour des portes Drapeaux, quelques jeunes marquaient par leurs présences la continuité de cette reconnaissance. Plus qu’un symbole, c’est une preuve d’intérêt portée par les nouvelles générations.
Un souvenir, mais pas uniquement. Le Maire de Ferrals les Montagnes, Daniel Pivas, rappelait par son discours, que pour éviter que de tels évènements ne se reproduisent, un devoir de mémoire reste indispensable. Il ajoutera : la liberté n’est jamais complètement acquise, elle se mérite et c’est un combat de chaque jour. Chacun d'entre nous se doit de rester vigilant.
Pourquoi se tourner vers le passé?
Aujourd’hui plus que jamais, il semble important de se souvenir des heures sombres qui ont recouvert l’Europe.
Cette période n’est pas si éloignée que cela.
Nous vivons des périodes difficiles, périodes qui pourraient ressembler à celles qui ont participé à la naissance du fascisme.
Le niveau de précarité atteint des proportions iniques. À titre d’exemple, d’après "l’observatoire des inégalités", 17 % des Européens vivent sous le seuil de pauvreté de leur pays (à 60 % du revenu médian). Cette proportion varie du simple au double, de 12 % de la population aux Pays-Bas à 25 % en Roumanie. Ces chiffres sont révélateurs.
Si l’Europe se penche sur le problème, certaines multinationales ont bien compris le parti qu’elles peuvent tirer de la situation. La peur et l’angoisse offrent une forme d’asservissement économique rendant les acteurs politiques malléables par une forme de chantage à l’emploi.
Comment dès lors offrir une légitimité de pouvoir si ce n’est en surfant sur des thématiques populaires voir, populiste? La stigmatisation de l’immigration, la culpabilisation des plus démunis, la prolongation de la durée de travail sont d’actualité et probablement à l’origine de frustrations. Comme le disait le député européen « Philippe Lamberts », nous sommes assis sur deux bombes, la première est économique, la seconde écologique.
Des solutions semblent exister, la taxation de l’automatisation en fait peut-être partie mais, l’économie n’en veut pas. En soi, cela semble logique…
Aujourd’hui, tout individu dès sa naissance, est sujet à l’imposition directe ou indirecte. La taxation des revenus du travail est l’une des sources les plus importantes des états.
Depuis quelque temps, l’individu ne suffit plus à remplir les caisses de ces mêmes états et pour cause, l’humain n’est plus l’outil le plus qualifié détrôné au profit de l’informatique. Depuis des décennies, les petites mains ont été remplacées par la numérisation et ce n’est qu’un début. Alors, si la main d’œuvre est source d’imposition pourquoi la machine qui remplace l’humain est-elle exonérée d’impôt ? Le Consul romain Lucius Cassius Longinus Ravilla demandait « à qui cela profite-t-il ? » (cui bono). La réponse se tourne peut-être vers les mêmes acteurs qui éludent l'impôt par montage financier. C'est légal, ce n'est pas civique.
Le débat n’est pas simple, mais mérite l'attention si l’on veut que les citoyens, car c’est bien d’eux qu’il s’agit, retrouvent une place équitable.
La France résume l’avenir par trois mots : Liberté, égalité, fraternité. C’est peut-être là que se trouve la solution à condition d’en comprendre le sens. Sommes-nous capables d’étendre ce rêve au niveau européen ? C’est de l’utopie disent certains, mais la démocratie l’était par le passé, elle nous a été accordée, elle est fragile, à nous de la préserver et en ce domaine, le souvenir fait partie de sa survie. On ne peut vivre libre sous le fléau de l’inégalité. On ne peut être égal sans un certain sens de la fraternité. En un sens, on pourrait remplacer le mot fraternité par solidarité, ce ne serait qu’une question de vocabulaire, mais qu’importe, il y a urgence, il suffit d’écouter certaines déclarations politiques pour s’en rendre compte.