C’est un moment historique pour la Tunisie, où le Parlement a adopté mardi soir à la quasi-unanimité, un projet de loi contre les discours racistes. Après d'interminables discussions, le projet de loi a été approuvé par 125 députés contre un seul et cinq abstentions. Ceux qui se rendront coupables d'actes racistes tels que détaillés dans le texte, seront passibles d'une condamnation allant d'un mois à un ans de prison, assortie d'une amende pouvant atteindre les 1 000 dinars (200 000 francs CFA).

Un à trois ans de prison

La loi pourrait être encore plus sévère pour les personnes accusées d'"incitation à la haine", de "menaces racistes", de "diffusion" et d'"apologie du racisme".

Elle pourrait également toucher ceux ou celles qui se rendraient coupables de "création" ou de "participation à une organisation soutenant de façon claire et répétitive les discriminations". Les coupables pourraient écoper d'une peine comprise entre une et trois années de prison, assortie d'une amende allant jusqu'à 3 000 dinars (600 000 francs CFA), un montant qui peut aller jusqu’à 15.000 dinars (3 millions de francs CFA) pour les personnes morales.

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Une avancée "historique"

Attendu depuis fort longtemps, le nouveau texte a été accueilli de manière favorable partout dans le monde.

Une avancée jugée d’"historique" par de nombreuses associations de défense des minorités, qui promettent de veiller à la bonne application de cette nouvelle disposition. "Nous devons, avec la force de la société civile, être une force de proposition pour appliquer la loi dans tous les domaines (...) Nous devons apprendre à vivre ensemble, et ce sera un travail à long terme", assure Zied Rouin, le coordinateur de l’association antiracisme "Mnemty", qui signifie "Mon rêve".

10 à 15% de résidents concernée

La même satisfaction prévaut du côté des étudiants subsahariens en Tunisie, un pays qui regorge entre 10 et 15% de résidents subsahariens, qui sont peu intégrés et n'accèdent pas aux postes de responsabilité. L'Association des étudiants et stagiaires africains en Tunisie s'est félicitée de l'adoption de la loi sanctionnant le racisme.

L’organisation qui regroupe quelque 4.500 membres s'inquiétait depuis quelques années de l'ampleur prise par les agressions à caractère raciste dans ce pays. "À présent, le grand combat sera l’application de cette loi", commente le Centrafricain Mack Arthur Deongane Yopasho, président de l’AESAT.

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Une victime de plus...

Les agressions visant des personnes en raison de leur couleur de peau deviennent monnaie courante en Tunisie. En août dernier, alors enceinte, une femme de nationalité ivoirienne avait été victime de jets de pierres pour avoir riposté à de graves provocations d'une bande de jeunes à Tunis la capitale.

Une scène qui a contribué à semer la panique chez d'autres résidents Subsahariens vivant dans son quartier.

"À 13 heures, je sortais de chez moi pour jeter la poubelle quand j’ai croisé un groupe de jeunes Tunisiens. Ils m’ont alors lancé des pierres. Je n’ai rien dit, préférant rester calme. Un Tunisien, qui passait, a vu la scène. Je l’ai interpellé : ‘Comment pouvez-vous les laisser me traiter de la sorte alors que je suis enceinte ?’ Mais il n’a pas réagi."

Ce témoignage est la parfaite illustration de ce que subissent les noirs en Tunisie. Par cette nouvelle loi contre le racisme, les autorités espèrent ainsi redorer l’image du pays, notamment à l’endroit des Subsahariens, de plus en plus victimes d’agressions et autres tracasseries.

Steve Gabin Guena