Hier, Donald Trump a annoncé le retrait des Etats-Unis sur ce qu'il appelle le "désastreux" accord sur le nucléaire iranien mais aussi l'alourdissement des sanctions économiques contre le régime islamique. Pourtant, Emmanuel Macron a été très actif ces derniers temps pour essayer de conserver cet accord afin de garantir les intérêts français sur place. Quitte même à se soumettre aux désirs du président américain, et à instaurer une relation diplomatique privilégiée avec la Maison Blanche qui était avant la chasse gardée du Royaume-Uni.
Désormais, Emmanuel Macron va devoir changer de stratégie, afin de ne pas se retrouver embourbé dans l'escalade avec l'Iran, après l'escalade militaire qui a eu lieu aujourd'hui sur le plateau du Golan entre l'Iran et un fidèle allié des Etats-Unis, Israël.
La France a des intérêts économiques en Iran
Depuis la levée des sanctions contre l'Iran en 2015, plusieurs entreprises comme Total ou PSA se sont durablement installés en Iran pour profiter des opportunités économiques qu'il apporte. En effet, Total s'est associé avec un groupe chinois pour exploiter le gisement pétrolier South Pars, et PSA possède désormais 30% de parts de marché sur l'automobile iranien. De même, à l'échelle européenne, Airbus a reçu une commande de l'ordre de 10 milliards de dollars de plusieurs compagnies aériennes iraniennes.
Donc un alourdissement des sanctions contre l'Iran risque de mettre en péril les entreprises européennes sur place. En effet, bien que les membres de l'Union Européenne essaient de ne pas être impactés par ses mesures drastiques américaines, la dépendance européenne envers les produits américains risque de produire des tensions si les pays européens décident de ne pas s'aligner sur les sanctions américaines.
Prenons un exemple simple. Airbus comme indiqué ci-dessus possède des commandes très prolifiques en Iran. Or dans la construction des A320 intervient des sous-traitants américains. Donc si les européens ne suivent pas les sanctions alourdies, alors il serait possible pour les américains de stopper les livraisons à Airbus, et ainsi mettre en péril l'ensemble du groupe européen.
Autre problème économique que cela pose: la guerre commerciale lancée par les Etats-Unis où les européens ont été jusque là épargnés, puisque Donald Trump avait annoncé prolonger jusqu'en Juin les exemptions de droit de douane sur l'acier et l'aluminium pour l'UE. Car depuis le mois de Janvier, l'Union Européenne était restée très prudente sur la possibilité des américains d'inclure l'Europe dans sa guerre commerciale qui devait toucher principalement les chinois.
Par conséquent, une tentative d'autonomie diplomatique de Bruxelles, risque de créer des tensions suffisantes avec la Maison Blanche pour activer cette guerre commerciale tant voulue par Donald Trump, et non seulement mettre en danger les intérêts européens en Iran, mais également aux Etats-Unis ce qui est d'autant plus grave.
Donc malgré l'indépendance européenne, il existe un certain lien de dépendance économique envers les Etats-Unis qui limite une diplomatie autonome française et européenne.
Macron et la diplomatie privilégiée avec les USA : un échec
Donc pour éviter un tel scénario, Emmanuel Macron a opté pour un rapprochement avec Donald Trump afin de créer d'étroites relations entre les deux pays pour essayer de peser sur les décisions du président américain par rapport à l'accord iranien.
En ce sens, on peut comprendre l'alignement immédiat d'Emmanuel Macron sur la décision américaine de bombarder conjointement des usines supposant fabriquer des armes chimiques en Syrie en Avril dernier. Mais également à travers les multiples rencontres entre les deux chefs d'Etat, les poignées de main, les gestes d'amitié qui se sont multipliés depuis 2 mois, Emmanuel Macron s'est servi de méthodes de communication pour montrer au monde ces nouvelles relations privilégiées entre les Etats-Unis et la France de sorte qu'il puisse devenir l'interlocuteur favori des Etats-Unis à travers le globe.
De même, il est à remarquer la politique de rapprochement d'Emmanuel Macron avec certains pays du Golfe persique: il a reçu en grandes pompes en ce même mois d'avril le prince héritier du royaume d'Arabie Saoudite Mohammed Ben Salmane, et en inaugurant le Louvre Abu-Dhabi en novembre dernier; des Etats farouchement opposés au régime iranien.
Mais toute cette politique internationale semble désormais tombée à l'eau pour le chef de l'Etat qui va devoir changer sa stratégie internationale afin de garder la face: soit il s'aligne sur les sanctions américaines et risque de d'intégrer l'escalade belliqueuse, soit il conserve à l'image de l'Union Européenne la stature de chef de la paix, qui essaie de discuter avec les deux parties pour essayer de trouver un accord, comme se fut le cas sur ce même accord du nucléaire iranien en 2015. La tâche s'annonce ardue pour Emmanuel Macron.