Le gouvernement et la République en marche pensent que le départ de Gérard Collomb est insignifiant, que c'est un epiphénomène , un non événement politique. Que nous dit réellement le départ de Gérard Collomb du ministère de l’Intérieur ? C'est un doute jeté dans la macronie qui oblige le Président à ne pas confondre conquête du pouvoir et gestion de celui-ci.

Gérard Collomb accentue les incertitudes en macronie

En adoubant Macron alors que presque personne ne croyait en lui, le Ministère de l’Intérieur a atteint deux cibles. La première: devenir ministre, lui le conseiller municipal de Lyon depuis 1977, devenu maire et jamais ministre car ses amis socialistes ne le voulaient pas.

La seconde: Gérard Collomb a montré que dans une démocratie représentative la patience paie ; il est devenu Ministre et il quitte son habit la tête froide et tranquille, même si certains estiment qu’il a trahi le Président.

Pour les marcheurs et la macronie en général, le départ de Gérard Collomb ne change rien à la poursuite des réformes entreprises par le Président de la République. Les méchantes langues au sein de la macronie comme Cohn-Bendit, ami du Président, considèrent que l’ex-ministre de l’Intérieur était fatigué et dépassé par les événements et qu’il ne lui restait qu’une chose : rejoindre sa bonne ville de Lyon pour s’y reposer et s’occuper de sa famille. Ce n’est pas une réponse politique mais de la méchanceté de bas étage, ce à quoi Collomb a répondu en descendant du TGV qu’il était de retour et bien portant parmi les siens, les Lyonnais.

Gérard Collomb va s’expliquer sur LCI, on n’attend pas de déclaration surprenante de sa part. Il va surement insister sur son départ comme moyen d’aider Emmanuel Macron en étant en phase avec les territoires, territoires que Macron a largement oublié au nom d’une technostructure élyséenne et matignonesque décalée avec le vrai monde et la vraie vie.

Le départ de Gérard Collomb introduit des doutes au sein de la macronie. Certains marcheurs estiment qu’il y a une déconnexion réelle entre le pouvoir politique et la société. Macron pense qu’il est dans son bon droit, qu’il n’y a pas lieu de douter de ses réformes, même si des résultats se font attendre. Le temps démocratique jouant contre le temps économique de Macron, les opposants à sa politique au sein de l’Assemblée nationale insistent sur les mauvaises nouvelles (hausse de la CSG pour les retraités, baisse du pouvoir d’achat, préférence pour les riches au nom de la théorie des premiers de cordée, etc.).

Le Président Macron continue sa politique, les privatisations futures concernant les aéroports de Paris et une partie de la Française des jeux montrent que le Président ne doute pas. Le départ de Gérard Collomb dit autre chose.

Prise et gestion de pouvoir : deux actes discutables en macronie

Le Président Macron a gagné l’élection présidentielle en appliquant la méthode Obama de questionnement des citoyens et de digitalisation de leurs réponses. La victoire du Président Macron a été implacable. Il a profité d’une conjonction de facteurs heureux: les hésitations incompréhensibles de François Fillon pour construire une communication de riposte, l’envie de changement des Français par leur vote, le délitement des partis politiques traditionnels (PS et LR) à cause de leurs querelles traditionnelles et divisions que les primaires ont mis en évidence.

Macron a gagné grâce à un discours acté par le mouvement. Une France en marche a été plébiscitée par l’ensemble des Français, de droite et de gauche et il a pu construire une plateforme digitale de prise de pouvoir au sein de laquelle le « en même temps » était l’alpha et l’oméga de sa politique propositionnelle. Macron éprouve des difficultés pour mettre en musique son pouvoir et le gérer efficacement au nom du nouveau monde. Le départ de Collomb précipite cette analyse du doute et de la difficulté du Président Macron à tenir ses troupes. Il ne suffit pas de faire des déclarations du type « je ne m’arrête pas, je ne dévie pas » pour être compris des Français dont il pense d’ailleurs qu’ils ne comprennent pas et que les Français passent leur temps à se plaindre.

Macron, dans la gestion du pouvoir, a fait le choix d’une technostructure déconnectée du terrain. La France est un pays politique et idéologique. On ne peut pas balayer plusieurs siècles d’histoire d’une main, c’est ce que Collomb a voulu lui signifier en démissionnant et en parlant de son aveuglement. Macron doit affronter les élections de 2019 et 2020, peut-il douter et continuer à rester arrogant ?