Tout avait bien commencé pour le président Emmanuel Macron après son élection en 2017. Il a réussi à restaurer l’autorité et la fonction présidentielle. Il est confronté aujourd’hui à un mouvement qu’il ne comprend pas (« Si la fronde des « gilets jaunes » a démarré sur le prix des carburants et la hausse des taxes annoncée encore pour janvier 2019 au nom de la défense de l’environnement, les revendications ont en effet évolué dès le 17 novembre vers un ras-le-bol plus général sur le coût de la vie et le pouvoir d’achat des classes moyennes, décorrélés des questions écologiques.

», écrit Le Monde) et qui est paradoxalement un mouvement macronien car il emprunte la même stratégie digitale utilisée naguère par le président pour arriver aux affaires. Les gilets jaunes constituent un mouvement bigarré que les historiens, sociologues, économistes et politistes décrivent comme original car il existe en dehors des corps intermédiaires traditionnels (partis politiques ou les syndicats).

Les gilets jaunes, ce sont les classes moyennes et populaires qui travaillent, habitent pour la plupart les zones rurales et, par leur révolte, font émerger des problèmes anciens. Ces populations sont victimes de nombreuses inégalités: revenus, désertification des services publics, fermeture de petites lignes ferroviaires.

Longtemps ignorées par les pouvoirs politiques, elles se révoltent. La problématique d’une taxe sur le carburant est la goutte de diesel qui déborde et qui met à nu la difficulté du gouvernement d’avoir un discours et une méthode cohérente pour s’adresser à ces populations. Les demandes des gilets jaunes sont nombreuses et impossibles à tenir : dissolution du gouvernement, démission du Président, adoption d’une assemblée citoyenne, pouvoir d'achat etc.

Le discours présidentiel du 27 novembre n’a pas réussi à convaincre les gilets jaunes

Les gilets jaunes dénoncent une pression fiscale et un pouvoir d’achat qui baisse. L’organisation internationale du travail vient publier un rapport qui montre que depuis 2008 et après le pic de 2010, les salaires n’ont pas augmenté en France.

Les décisions prises par le gouvernement et le président Macron (ordonnances sur le marché du travail, baisse des charges portant sur les bas salaires, réduction de la taxe d’habitation, diverses mesures pour aider les populations à la conversion énergétique) vont dans le bon sens mais, malheureusement, ne sont pas comprises par les gilets jaunes car non expliquées sur le terrain.

Le président Macron peut défendre son projet présidentiel, mais la politique se mène aussi sur le terrain de l’explication non technocratique. On n’est jamais fort tout seul. La verticalité présidentielle est contestée au sein même de son propre mouvement LAREM. Patrick Vignal, député de l’Hérault, estime qu’il faut que le gouvernement comprenne le mouvement des gilets jaunes en apaisant leur colère.

Le président a répondu par la méthode de concertation pour traiter des questions écologiques dans toutes les régions et territoires de France. La méthode est bonne mais les gilets jaunes veulent que le gouvernement traite de la question immédiate du pouvoir d’achat.

Le président Macron se rend compte que le temps politique (celui des demandes contradictoires des populations) n’a rien à voir avec le temps économique dominé par un temps long qui nécessite de la distance avant que les premiers résultats n’apparaissent.

De la nécessité de comprendre ce mouvement social inédit en y apportant des réponses

Le Président a axé son projet politique sur la compréhension et la considération des populations françaises.

Nous y sommes. Voici un cas d’école qui doit lui permettre de revenir à une horizontalité sociale méthodique en regardant la France dans le fond des yeux ( «Ni les images de violences et de dégradations choquantes de ce week-end ni surtout l'intervention d'Emmanuel Macron mardi n'ont permis d'atténuer le soutien au mouvement. Bien au contraire, il semble même que l'intervention d'Emmanuel Macron et ses annonces n'ont fait que renforcer la colère», analyse Gaël Sliman, le président d'Odoxa. Cite le Figaro). Il ne s’agit pas de se dédire mais de donner des réponses claires aux populations. Gouverner, c’est choisir et il y a des choix de long terme et ceux de court terme. La question de la redistribution est au cœur du projet présidentiel.

Les dépenses publiques ont augmenté. Les choix économiques en faveur des nantis ont été faits dans le domaine de ISF sans contrepartie. La désindustrialisation française est souvent citée, il y a de moins en moins d’emplois. La France est-elle prête à s’attaquer à des dépenses publiques élevées par la réforme des fonctions publiques d’Etat, hospitalières et territoriales ?