Les autorités du régime iranien ont restreint considérablement le flux de l’internet pour contrer les protestations à l’égard de la dictature, mais les Iraniens ont échappé à la censure grâce à l’utilisation de réseaux privés (VPN). Lorsque le Conseil suprême de sécurité nationale du régime a d’abord ralenti la vitesse de connexion, fermé certaines applications et même les VPN que les Iraniens utilisaient depuis des années pour échapper aux restrictions, la société de M. Nouri, un entrepreneur en technologies qui emploie 15 personnes, a été lourdement affectée.

Cité par les médias iraniens, il a déclaré : « Nous n’étions pas capables de communiquer avec nos utilisateurs et nous avons perdu des paiements. » Pourtant, cela ne lui a pris que trois jours pour trouver un autre serveur afin d’héberger son application mobile de création et continuer ses affaires.

D’autres sociétés qui ont été touchées par la répression n’ont pas été aussi chanceuses, comme la société de transport privée « Snapp », ainsi que des milliers de petites entreprises. Certaines personnes sont préoccupées par le fait que, malgré leurs efforts pour contourner les restrictions, le régime réussit quand même à avoir le dessus. Cité par les médias de l'opposition, A. Rashidi, un chercheur en sécurité sur internet, a déclaré : « C’est vraiment difficile de contourner ces restrictions.

Presque tous les outils disponibles sont bloqués et le gouvernement iranien fait tout ce qu’il peut pour bloquer l’accès à internet (…) Ce n’était pas aussi intense en 2009. Certains jours, je ne peux même pas parler avec ma famille via internet. »

Des manifestations à travers tout l'Iran

Les protestations ont commencé le 28 décembre contre l’augmentation du coût de la vie dans la deuxième ville d’Iran, Machhad.

Mais rapidement, elles se sont transformées en une révolte majeure contre le régime. Ce sont les plus importantes depuis le soulèvement post-électoral en 2009 contre l’élection présidentielle truquée. Au moins 50 personnes sont mortes à cause d’une répression brutale, près de 8000 personnes ont été emprisonnées, selon l’opposition, et on craint des condamnations à mort.

La récente révolte, qui a démarré avec des revendications économiques en réaction à la misère généralisée, s’est radicalisée rapidement pour cibler les fondements même du régime et appeler au renversement de la dictature. Aucune des factions du régime n’échappe à la colère populaire. « Conservateurs, réformistes, le jeu est terminé pour vous », scandaient les manifestants à Téhéran pour exprimer le rejet du régime dans son ensemble. Les promesses de « modération » d’Hassan Rohani, le président du régime, ne semblent plus tromper une population désabusée par le jeu de dupe du régime pour prolonger son existence.

Afin de mettre fin aux protestations favorisées par le cyberspace, le régime a coupé Telegram et Instagram, ralenti la vitesse de la connexion, et a parfois même coupé complètement le flux internet.

C’est une tactique insidieuse souvent utilisée par le régime islamiste pour mettre un terme à la gronde populaire. Mais à chaque fois que le régime essaie de le censurer, les Iraniens deviennent juste meilleurs pour contourner les restrictions.

Les Moudjahidine du Peuple d'Iran

L’opposition avait pu tirer profit de l’extraordinaire moyen de mobilisation que représentent les réseaux sociaux. L’Organisation des Moudjahidine du Peuple d’Iran, la principale force d’opposition qui bénéficie d’un puissant réseau d’organisation de résistance à l’intérieur du pays, a joué un rôle déterminant dans la coordination des manifestations. Furieux, le président iranien Hassan Rohani a appelé au téléphone son homologue français pour se plaindre des activités du mouvement, dont le siège européen est basé à Auvers-sur-Oise, en banlieue parisienne.

Accusant l’organisation de résistance d’être un « groupe terroriste », il a demandé à Emmanuel Macron de restreindre ses activités en France, où elle organise régulièrement des manifestations contre le régime en place. « "Nous critiquons le fait qu'un groupe terroriste a une base en France, agit contre le peuple iranien et encourage la violence. Nous attendons du gouvernement français qu'il agisse contre ce groupuscule terroriste", a déclaré Rohani selon la télévision iranienne.

Sans faire mention des demandes scandaleuses du président des mollahs, l'Élysée a annoncé dans une déclaration le 2 janvier qu’Emmanuel Macron est "préoccupé" face "au nombre de victimes liées aux manifestations" des derniers jours en Iran et a appelé Hassan Rohani "à la retenue et à l'apaisement".

Dans un message envoyé aux manifestants iraniens, Maryam Radjavi, la dirigeante du Conseil national de la Résistance iranienne (CNRI), dont l’OMPI en est une composante, a déclaré le 4 janvier : « Les mollahs s’imaginent qu’en bloquant Internet et les réseaux sociaux, ils peuvent empêcher votre soulèvement d’avancer et de se développer. Mais ils ne savent pas et ne peuvent pas savoir que ce sont vos cœurs unis et vos souffrances communes qui envoient partout le message de votre révolte et qui font se soulever les villes les unes après les autres. J’appelle tous mes compatriotes à se dresser et à rejoindre les vagues grondantes de la liberté qui balaient l’ensemble de l’Iran. »