Dans l'actualité d'Emmanuel Macron, la réforme des retraites qui devrait être votée se présente au premier plan. La limite d’âge a fait l'objet de beaucoup de débats. Mais, dans le projet proposé par le ministre Delevoye, on trouve également une réforme du minimum de retraite : celui-ci est prévu de passer à 85 % du smic. Une belle augmentation qui sera bénéfique en particulier aux femmes mais aussi aux agriculteurs. Rien de révolutionnaire pourtant, dans cette réforme. Il s’agit en fait d'un projet qui s'inscrit dans la continuité des projets de loi précédents.

Rien d'étonnant. Emmanuel Macron est le représentant du système.

Anti-système

Pourtant, il avait eu, au début de sa campagne présidentielle, l’audace de se présenter comme un candidat anti-système – Le regard des autres, celui des représentants du « vieux monde », de la caste, du système politique – dont il tenait soigneusement à se différencier –, a évolué bien sûr. D’abord intrigué, puis moqueur, il est devenu vaguement inquiet et incrédule. Puis ébahi. Emmanuel Macron, cet ovni politique, encore parfaitement inconnu il y a quatre ans, a gagné, à la barbe des plus anciens, et faisant fi des règles non écrites de la politique, la campagne présidentielle, et ce en se présentant comme une alternative au système.

Mais le système, il en vient.

« Je n’ai jamais accepté le confort d’un système »

Il s’est élevé à une vitesse fulgurante grâce au « système ». Celui de la haute fonction publique, puis de la finance. « C’est le système qui l’a poussé, par un mécanisme d’ascension républicaine, par une espèce de compagnonnage qui fait qu’il repère et pousse en avant les meilleurs », assure un grand patron.

« Ces systèmes, je m’y suis imposé par le travail et je n’y suis pas resté. Une fois que je les avais compris, je ne m’y suis pas installé », argue Emmanuel Macron en rappelant que, quand il quitte Rothschild, il « lâche tout ce qu’il a » pour aller à l’Élysée. Tout comme lorsqu’il quitte l’Élysée sans rien demander en juin 2014, avant d’être nommé, le 26 août, ministre de l’Économie.

Soit. Qui de l’œuf ou de la poule ? En tout cas, ce qui est sûr, c’est qu’une poignée de représentants ô combien symboliques du fameux système à la française, d’influents et discrets acteurs de la nomenklatura française ont eu un rôle déterminant dans l’ascension du jeune homme.

Premiers émois politiques

Certes, il a su habilement prendre ses distances vis-à-vis du système dans sa communication. Manière de se distinguer de l’univers politique dont il veut absolument se détacher, tant il a conscience de la profonde défiance qu’il inspire, Macron ne met pas en avant ses propres incursions politiques passées. Sa tentative de s’implanter au Touquet, où il se rend presque tous les week-ends dans la maison de Brigitte, puis dans les Hautes-Pyrénées, il n’en parle guère.

Ses débuts chez Jean-Pierre Chevènement, peu compatibles avec sa grande proximité intellectuelle avec Michel Rocard, il en parle peu tout en relevant l’estime qu’il a pour l’ancien ministre. Or il ne vient pas de nulle part. Il n’a pas grandi dans un monde lyophilisé, loin de la politique ou sans s’y intéresser, uniquement le nez plongé dans les grands auteurs, comme ses premiers portraits ont pu le laisser croire. Non, en vérité, il a « toujours été a « toujours été attiré et intéressé par la politique » et a été élevé dans une famille clairement de gauche. Ses parents, comme sa grand-mère adorée chez qui ils ont fêté la victoire de Mitterrand en 1981, s’intéressaient à la politique, mais « n’étaient pas militants, moi non plus d’ailleurs », souligne-t-il afin de mettre en avant sa « virginité électorale ».

Ainsi, à côté des romans et de la littérature, il a dévoré, à seize ans, « passionné », le premier Verbatim de Jacques Attali. Un livre assez aride pour un ado, qui lui donnait l’impression de pénétrer dans le coeur nucléaire du pouvoir. Il a lu aussi, plus tard, la plupart des biographies politiques de Jean Lacouture sur de Gaulle, mais aussi sur François Mitterrand, Pierre Mendès France. Il a découvert également les livres de Michel Rocard avant de faire sa connaissance par l’intermédiaire d’Henry Hermand et certains ouvrages du général de Gaulle, de même que ses discours : « Je les relis régulièrement, j’aime bien son style, ses phrases d’une grande sobriété », précise-t-il aujourd’hui.